Avec ses trottoirs – тротуа́ры (tratoiry) élargis et ses façades – фаса́ды (façady) repeintes, le centre de Moscou (tsentr Moskvy) est devenu un lieu où il fait bon flâner – прогу́ливаться (pragoulivatsa). Mais c’est aussi le lieu où tous les styles d’architecture – архитекту́рные сти́ли (arkhitektournyé stili) se mélangent. Le CREF vous propose une promenade dans le temps pour vous y retrouver un peu.
Pour reconnaître de l’ancien typiquement russe, repérez un toit pentu à plusieurs facettes – многогра́нный (mnagagrannyi). Le « chatior » – шатëр, en forme de pyramide, couvre, par exemple les tours secondaires du Kremlin et de nombreux anciens clochers – часо́вни (tchasovni). Le plus ancien exemple en pierre est celui de l’église de l’ascension dans le parc Kolomenskoïé (1532). On trouve ici et là, à Moscou, des demeures russes typiques du 16e siècle –пала́ты (palaty), ces maisons blanches et basses aux petites fenêtres – о́кна (okna) et aux toits – кры́ши (krychi) gris, comme sur la rue Varvarka, celles de la dynastie des Romanov, près de la place Rouge.
Les églises – це́ркви (tserkvi) des 18e et 19e siècles sont pratiquement toutes de style néo-classique, avec colonnades – колонна́ды (calanady) et frontons – фронто́ны (frantony). A l’époque, les modèles sont diffusés et reproduits à l’identique à travers tout le pays.
Les règles – пра́вила (pravila) d’architecture religieuse n’en sont pas moins soumises à la grammaire symbolique de l’orthodoxie – правосла́вие (pravaslavié). Ainsi, la couleur des coupoles en forme de bulbe – лукави́чные купола́ (loukavitchnyé koupala) a son importance. Les bulbes bleus ornés d’étoiles – звëзды (zviozdy) indiquent que l’église est consacrée à la Vierge Marie – Богоро́дица (Bagaroditsa). Les étoiles symbolisent l’étoile de Bethléem – Вифлее́мская звезда́ (Vifleemskaya zvezda). Les bulbes verts indiquent une église consacrée à la Trinité – Тро́ица (Troïtsa) ou bien à un saint en particulier (on utilise aussi le gris pour les saints). L’or a valeur de pureté – чистота́ (tchistata) et d’éternité – ве́чность (vetchnast’). Le noir est réservé aux églises des monastères – монастыри́ (manastyri). Leur nombre est aussi significatif. Par exemple, une seule coupole symbolise le Saint Esprit, cinq coupoles représentent les quatre évangélistes et le Sauveur – Спаси́тель (Spassitel’).
L’architecture, ce sont aussi des choses invisibles, comme le simple fait que les ponts – мосты́ (mosty) et les édifices – cооруже́ния (saaroujénia) ne s’écroulent pas. Au 19e siècle, un bureau d’urbanisme est créé pour contrôler toutes les constructions du pays et il sera dirigé tout au long du siècle par des ingénieurs – инжене́ры (ingéniéry) français issus de nos Grandes Écoles. Une caractéristique des méthodes françaises est l’obligation de tester la résistance des matériaux – про́чность материа́лов (protchnast’ materialov) avant d’entreprendre une construction de grande ampleur. Cela explique sans doute l’absence totale d’accidents de construction – отсу́тствие строи́тельных инциде́нтов (atoutstvié straïtelnykh intsidentov), alors que les États-Unis et la Grande-Bretagne ont connu des déconvenues spectaculaires jusqu’en 1940, par exemple, avec le fameux pont de Tacoma Narrows.
Certains grands immeubles assez hauts aux façades sobres sont d’anciens immeubles de rapport – дохо́дные дома́ (dakhodnyé dama) : on les louait pour obtenir une rente – дохо́д (dakhod). Ils sont généralement construits par des entreprises au 19e siècle. Ils ont souvent plusieurs entrées « de parade » – пара́дный подъе́зд (paradny padiézd) sur la rue, et des entrées de service – служе́бный вхо́д (sloujebny vkhod) dans la cour – во дворе́ (va dvarié). Le bâtiment où se trouve le CREF était un immeuble de rapport construit par une compagnie d’assurances à la fin du 19e siècle.
Fiodor Chekhtel – Фëдор Ше́хтель est l’auteur des plus beaux exemples d’ « art nouveau » – стиль моде́рн (stil madern) à Moscou, notamment la maison de Gorki et la gare de Iaroslavl, cette dernière étant sur la place des Trois Gares. Novateur en son temps, il sera oublié à l’époque soviétique. L’avant-garde soviétique des années 1920 est caractérisée par le « constructivisme » – конструктиви́зм (canstrouctivisme). La station « Tchistyé Proudy », à côté du CREF, en est un bel exemple. Le constructivisme emploie des figures géométriques – геометри́ческие фигу́ры (guéamétritcheskié figoury) simples et privilégie l’aspect fonctionnel.
L’époque stalinienne a laissé nombre d’exemples de monumentalité – монумента́льность (monumentalnost’) à commencer par le métro de Moscou. Plus question de sobriété des formes, au contraire, nous sommes dans une débauche toute romaine de symboles de l’antiquité – си́мволы анти́чности (simboli antitchnost) à la sauce soviétique. Matériaux nobles, sculptures démesurées, rien n’est assez grand ni beau pour chanter la gloire du système. Moscou compte aussi sept « tours staliniennes » – ста́линские высо́тки (stalinskyé vissotki), dont la plus imposante est le bâtiment de l’université de Moscou. Si vous ambitionnez d’en faire le tour, ayez de bonnes chaussures de marche ! C’est aussi à l’époque soviétique qu’on déplace – передви́гать (pérédvigat’) des bâtiments, comme l’actuelle mairie de Moscou rue Tverskaïa, pour agrandir – разши́рить (razchirit’) les avenues.
Des années 1970, il reste notamment des édifices qui mêlent le verre – стекло́ (stiéklo) et le béton – бето́н (bétone) à la monumentalité. Le palais des congrès, au Kremlin, en est un exemple, un autre est l’ancien cinéma – кинотеа́тр (kinatéatr) sur la place Pouchkine. D’ailleurs, dans les quartiers périphériques et dans toute l’ancienne URSS, de nombreux cinémas imitent son style.
Plus on s’éloigne du centre, plus on trouve des immeubles de logement – жилы́е дома́ (jylyé dama) qui se ressemblent tous. En effet, la tradition du plan type des églises du 18e siècle est maintenue pour ce que l’on appellerait en France les « grands ensembles » – жилы́е масси́вы (jylyé massivy) de l’ère soviétique. Dans les années 1960, Krouchtchev fait construire des bâtiments de 5 étages en préfabriqué pour résoudre la crise du logement. Censés durer vingt ans, ils sont toujours là.
La ville de Moscou a commencé à remplacer ces fameuses « Krouchtchiovki » – Хрущëвки par d’énormes édifices de plus de vingt étages entourés de places de parking – парко́вочные места (parkovatchnyé miesta). Une loi – зако́н (zakon) est en cours de discussion pour faire la même chose dans tout le pays.
Vous voilà à peu près parés pour de découvrir le Moscou d’un regard neuf – со све́жим взгля́дом (sa sviéjim vzgliadom) !